Depuis le 1er janvier 2017, le dirigeant de la personne morale titulaire du certificat d’immatriculation doit révéler aux autorités l’identité et l’adresse de la « personne » auteur de l’infraction routière commise avec un véhicule de l’entreprise (Cf. art. L. 126-1 du Code de la route).
Les infractions routières concernées sont celles listées à l’article R. 121-6 du Code de la route, commises avec un véhicule dont la personne morale est titulaire du certificat d’immatriculation et constatées au moyen d’un appareil de contrôle automatique homologué.
Le dirigeant de cette personne morale doit indiquer à l’autorité verbalisatrice mentionnée sur l’avis de contravention l’identité et l’adresse du salarié qui conduisait le véhicule, ainsi que la référence du permis de conduire de ce dernier.
Le dirigeant n’est dispensé de cette obligation de désignation qu’à condition d’établir l’existence d’un vol, d’une usurpation de plaque d’immatriculation ou de tout autre événement de force majeure.
Cette dénonciation peut être effectuée par lettre recommandée ou de façon dématérialisée dans un délai de 45 jours à compter de l’envoi ou de la remise de l’avis de contravention.
Le dirigeant de la personne morale qui ne révèle pas l’identité de la personne ayant réalisé l’infraction encourt :
– D’une part, l’amende prévue pour les contraventions de 4ème classe, soit 750 € au maximum (article L. 121-6 du Code de la route),
– D’autre part, l’amende due au titre de l’infraction initiale (article L. 223-1 du Code de la route).
Cette double sanction est applicable pour les avis de contravention envoyés à partir du 1er janvier 2017, y compris si l’infraction a été relevée à une date antérieure.
Ces amendes ne doivent pas reposer sur les finances de l’entreprise mais sur celles du dirigeant.
En effet, dans l’hypothèse où le chef d’entreprise ferait payer par la société les contraventions routières de ses salariés, il s’exposerait à des poursuites pour abus de biens sociaux pour utilisation du capital de sa société à des fins non autorisées (Cass. Crim. 3 février 1992, n°90-85.431). Pour rappel, l’abus de biens sociaux est puni de 5 ans d’emprisonnement et de 375.000 € d’amende.
Ce principe est d’ailleurs rappelé sur les avis de contraventions adressés au titulaire de la carte grise : « cette amende vous est personnelle et ne peut donc être prise en charge par la personne morale dont vous êtes le représentant légal (un tel paiement peut vous exposer à des poursuites pénales) ».
En pratique, les poursuites des dirigeants des sociétés ayant payé, sur le patrimoine de celles-ci, les contraventions de leurs salariés sont quasi inexistantes. Il reste qu’en l’état actuel du droit, des poursuites sont possibles.
Par ailleurs, la Cour de cassation a récemment considéré que la prise en charge, par l’employeur, des amendes réprimant une contravention au code de la route commise par un salarié de l’entreprise constituait un avantage en nature au sens de l’article 242-1 du Code de la sécurité sociale devant être intégré dans l’assiette des cotisations de sécurité sociale (Cass. 2ème civ. 9 mars 2017, n° 15-27.538).
Se pose enfin la question de savoir si du fait d’infractions routières commises par des salariés non dénoncées, le dirigeant pourrait se voir retirer des points de son propre permis de conduire.
Il convient de préciser qu’en réglant l’amende initiale sans dénoncer l’auteur de l’infraction indiquée sur le procès-verbal, le dirigeant reconnait être l’auteur de cette infraction.
L’article L. 223-1 du Code de la route dispose en effet que « la réalité d’une infraction entraînant retrait de points est établie par le paiement d’une amende forfaitaire ou l’émission du titre exécutoire de l’amende forfaitaire majorée, l’exécution d’une composition pénale ou par une condamnation définitive ».
Le paiement de l’amende entraîne de plein droit la réduction du nombre de points dont est affecté le permis de conduire du titulaire. Celui qui a réglé l’amende ne peut plus revendiquer le fait qu’il n’est pas le véritable auteur de l’infraction (CE, avis, 26 juillet 2006, n° 292750).
Il ne s’agit que d’un avis du Conseil d’Etat antérieur à la réforme applicable depuis le 1er janvier 2017.
Nous ne connaissons pas la position des tribunaux sur ce point et nous n’avons pas de recul sur le risque réellement encouru par le dirigeant, l’application des nouvelles dispositions étant très récente.
Mais le risque ne peut pas être éludé.
Toutefois, même à considérer qu’un retrait de points sur le permis de conduire du dirigeant soit possible, il nous paraît difficile de ne pas payer les amendes.
En effet, à défaut de paiement, des majorations vont être appliquées et surtout, le dirigeant risque de faire l’objet d’une saisie, voire de poursuites judiciaires devant le tribunal de police (article 521 du Code de procédure pénale).
Dans ces conditions, il est fortement recommandé aux chefs d’entreprise de prendre des précautions dans la gestion des avis de contravention et des signalements des conducteurs.
Ces précautions sont le seul véritable moyen de se conformer à la loi et de facto de préserver les intérêts de la société et de son dirigeant.