Par deux décisions du 15 mars 2018 (n° 17-11336 et 17-10325), la deuxième chambre civile de la Cour de cassation est venue bouleverser l’alignement du régime social des indemnités de rupture du contrat de travail sur le régime fiscal selon l’attendu de principe suivant :
« Mais attendu qu’il résulte des dispositions du premier alinéa de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale que les sommes versées au salarié lors de la rupture du contrat de travail autres que les indemnités mentionnées au dixième alinéa, dans sa rédaction applicable à la date d’exigibilité des cotisations litigieuses, sont comprises dans l’assiette de cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales, à moins que l’employeur rapporte la preuve qu’elles concourent, pour tout ou partie de leur montant, à l’indemnisation d’un préjudice;»
La Cour rompt ainsi avec sa jurisprudence traditionnelle en ne faisant plus référence aux indemnités limitativement énumérées à l’article 80 duodecies du Code Général des Impôts (CGI), ouvrant ainsi le champ des possibles.
La position de la Cour est désormais plus claire : les indemnités versées lors de la rupture du contrat de travail, même celles non visées par le CGI, sont en principe soumises aux cotisations de sécurité sociale. Elles ne peuvent en être exonérées que si l’employeur parvient à démontrer le caractère indemnitaire de ces sommes.
Dans ces arrêts, la Cour précise, par ailleurs, le régime probatoire de l’exonération de cotisations sociales des indemnités transactionnelles faisant suite à une rupture du contrat de travail.
Ce thème n’est ici pas nouveau puisque la Cour considère de manière classique que les indemnités versées à l’occasion de la rupture du contrat de travail doivent être soumises à cotisations si elles ont une nature salariale, et en sont exonérées si elles sont représentatives de dommages et intérêts.
L’indemnité transactionnelle n’est donc pas assujettie aux cotisations sociales lorsqu’elle a pour objet de réparer le préjudice né de la perte de l’emploi ou des circonstances de la rupture, le juge ayant un pouvoir souverain pour apprécier les éléments de preuve de ce caractère indemnitaire.
La première espèce concerne des indemnités transactionnelles versées à la suite de départs en retraite.
En plus d’une présentation des faits maladroite dans les protocoles, ces actes prévoyaient expressément que les indemnités transactionnelles seraient soumises à cotisations sociales.
Dès lors, il était vain pour l’employeur de tenter de justifier un quelconque caractère indemnitaire.
La deuxième espèce vise, quant à elle, les indemnités transactionnelles versées à la suite de licenciements pour faute grave, le véritable sujet étant celui de l’exonération de cotisations sociales des indemnités compensatrices de préavis.
Les Urssaf avaient, en effet, pris l’habitude de considérer (sur la base d’une jurisprudence sujette à discussion de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation du 20 septembre 2012 n° 11-22916 non publiée au bulletin) qu’un employeur qui conclut avec un salarié une transaction après l’avoir licencié pour faute grave « renonce nécessairement à la qualification de faute grave », de sorte qu’un redressement était systématiquement opéré sur la partie de l’indemnité transactionnelle correspondant à l’indemnité compensatrice de préavis à laquelle le salarié aurait eu droit.
La Cour de cassation donne ici la clé pour échapper à cette issue : rédiger un protocole transactionnel « clair, précis, sans ambiguïté et dans lequel la volonté des parties est clairement exprimée ».
Dans l’espèce, les protocoles prévoyaient explicitement que les licenciements reposaient sur une faute grave et que les salariés n’exécuteraient aucun préavis et ne demanderaient aucune autre indemnité.
La Cour a de ce fait considéré que les indemnités transactionnelles avaient un fondement exclusivement indemnitaire, n’appelant aucun redressement de la part de l’Urssaf.