Dans un arrêt du 17 septembre 2020[1], la Cour de Cassation a rappelé que le bailleur qui n’établit pas la réalité des charges dont il demande le paiement, doit restituer au locataire les provisions précédemment versées.
En l’espèce, le bail prévoyait que le locataire devait rembourser au bailleur les charges locatives et certaines taxes. A la suite de la résiliation du bail, le bailleur a poursuivi le garant solidaire du preneur en paiement de divers arriérés de charges.
Ce dernier soutenait que le bailleur n’établissait pas la créance dont il poursuivait le paiement. En outre, il lui réclamait la restitution des provisions versées au titre des charges. Le bailleur soutenait quant à lui, qu’il appartient à celui qui réclame la restitution des sommes qu’il prétend avoir indument réglées, d’établir que les charges et taxes n’étaient pas dues.
Par un arrêt du 5 décembre 2018, la Cour d’appel de Paris a débouté le bailleur de sa demande de condamnation en paiement et a accueilli favorablement la demande du garant du preneur, en remboursement des provisions pour charges versées (CA Paris, Pôle 5, 3ème ch., 5 décembre 2018, n°17/07400).
Le bailleur s’est alors pourvu en cassation affirmant que la Cour d’appel avait violé l’article 1353 du Code civil en inversant la charge de la preuve.
La Cour de cassation a rejeté son pourvoi et précisé « qu’il incombe au bailleur qui réclame au preneur de lui rembourser, conformément au contrat de bail commercial le prévoyant, un ensemble de dépenses et de taxes d’établir sa créance en démontrant l’existence et le montant de ces charges ».
C’est donc au bailleur qu’il appartient d’établir sa créance et non au preneur de démontrer que les charges n’étaient pas dues.
Cette décision appelée à une large publication, n’est pas surprenante. La Cour de cassation avait déjà jugé que le bailleur qui n’établit pas la réalité des charges doit restituer au preneur les provisions qu’il a précédemment réglées[2].. Le juge considère en effet, que dans le cas où le bailleur ne peut pas justifier des charges locatives qu’il a supporté, il n’y aucune preuve de leur existence et du montant de sa créance. Les versements provisionnels effectués sont ainsi dépourvus de causes.
Il convient de préciser qu’en l’espèce, le bail ayant été conclu avant la loi dite Pinel, les articles L. 145-40-2 et R. 145-35 du Code de commerce ne s’appliquaient pas. Ces dispositions prévoient désormais que le bailleur doit établir un état récapitulatif annuel reprenant l’ensemble des charges du bail et qu’il doit en outre communiquer au locataire, à sa demande, les documents pouvant justifier le montant des charges, impôts, taxes et redevances qui lui sont imputés.
Par conséquent, il s’agira pour le bailleur de veiller à établir et justifier l’ensemble des charges dont le paiement est exigé du locataire.
[1] Civ. 3ème, 17 septembre 2020, n°19-14.168, FS-P+B+I
[2] Civ.3ème, 9 juin 2015, n°14-13.555 ; Civ.3ème, 15 février 2018, n°16-19-.522
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