Conditionnements des alcools et publicité : Condamnation de Piper-Heidsieck

Par Eric Andrieu

L’ANPAA poursuivait en référé Piper-Heidsieck du fait de la commercialisation de bouteilles de champagne dans des coffrets en forme de rouge à lèvres.

 

 

C’était l’occasion d’obtenir enfin une décision claire sur le statut des conditionnements.

 

Il faudra encore patienter.

 

Le juge des référés, dans une ordonnance du 20 décembre 2018, rappelle l’article L.3323-4 du Code de la santé publique dont le 3ème alinéa est :

 

« Le conditionnement ne peut être reproduit que s’il est conforme aux dispositions précédentes » (origine du produit, composition, élaboration, modes de consommation…).

 

Il relève ensuite, au vu de constats de l’ANPAA, la présence des conditionnements sur :

 

– un catalogue à destination des professionnels sur rayon-boissons.com,
– le site piper-heidsieck.com annonçant la mise en vente du coffret aux Galeries Lafayette,
– une vitrine des Galeries Lafayette

 

L’exposition dans une vitrine n’est manifestement pas une reproduction du conditionnement.

 

La présence sur des sites internet pourrait l’être.

 

La simple application de l’article L.3323-4 aurait dû, au vu de ce constat, entraîner l’injonction de supprimer les publicités concernées (à supposer qu’il s’agisse bien de publicités).

 

L’injonction de retirer les produits des linéaires (dès le lendemain de l’ordonnance) semble en revanche aller au-delà du texte de loi.

 

Celui-ci établit clairement une différence entre les conditionnements et la publicité.

 

Il n’impose pas aux conditionnements d’être conformes aux éléments prévus à l’article L.332-4. Il interdit uniquement de les reproduire publicitairement s’ils ne les respectent pas.

 

On pourra penser que cette décision repose sur une appréciation plus émotionnelle que juridique, le juge ayant considéré que « la reproduction d’un bâton de rouge à lèvres est porteuse d’un message subliminal destiné à associer la consommation d’alcool à la séduction féminine » puis que « l’association entre la séduction, la féminité, la beauté et la boisson alcoolisée constitue un message manifestement illicite ».

 

Cette association est en effet critiquable mais elle ne peut concerner qu’une publicité et non un conditionnement.

 

On ajoutera que la phrase « le coffret litigieux constitue une incitation à consommer sans rapport avec les diverses informations autorisées par la loi » méconnaît une nouvelle fois le principe même de la publicité qui ne doit pas être confondue avec l’information et dont l’incitation est la raison d’être.

 

TGI Paris – ANPAA c/ Piper-Heidsieck -20 décembre 2018