Extension du domaine de la protection du preneur en procédure collective

Par Nicolas Sidier et Aurélie Pouliguen-Mandrin

La Cour de Cassation (Cass.Com 24 janvier 2018, n° 16-13.333) vient de prononcer un arrêt extrêmement favorable à la position du preneur en procédure collective.

 

Pour mémoire, depuis l’ordonnance du 9 décembre 2010 (n° 2010-1512), il est prévu une faculté supplémentaire de mettre un terme à un bail commercial sans attendre le terme ou une échéance triennale « au jour où le bailleur est informé de la décision de l’administrateur de ne pas continuer le bail ».

 

Compte tenu de la rédaction de ces dispositions codifiées à l’article L.622-14-1° du Code de Commerce, l’on pouvait comprendre que la résiliation prenait effet à la date de réception de la décision de l’administrateur judiciaire.

 

C’est précisément la question que vient de trancher la Chambre Commerciale de la Cour de Cassation dans cette décision appelée à la plus large publicité puisque destinée à une publication non seulement au bulletin, mais également sur le site Internet de la juridiction.

 

En l’occurrence, l’administrateur judiciaire avait fait connaitre le dernier jour de la procédure de sauvegarde sa décision de mettre un terme aux baux commerciaux dont bénéficiait son administrée à une date postérieure à celle à laquelle le bailleur a reçu l’information visée à l’article L.622-14-1° du Code de Commerce.

 

Le bailleur avait entrepris de contester cette décision en faisant valoir :

 

– Que l’option serait fermée au preneur qui avait décidé dans un premier temps de la poursuite des baux en question et ne pouvait ensuite procéder à leur résiliation.

 

Pour être tout à fait précis, le pourvoi soutenait également que cette résiliation n’aurait pu être poursuivie qu’à la condition de justifier que le débiteur ne disposait pas des fonds nécessaires au paiement des prochains loyers à échoir, hypothèse visée à l’article L..622-13-2 du Code de Commerce.

 

– Enfin, la notification de résiliation aurait dû être immédiate et ne pouvait viser une date ultérieure.

 

La Cour de Cassation a rejeté l’ensemble de ces moyens, étant observé que si la poursuite du bail a été décidée de facto, le bailleur n’avait jamais songé à mettre en demeure le preneur sur ses intentions de continuer ou non le contrat en cours.

 

La Cour de Cassation rappelle également que le droit de mettre un terme au bail existe en tout état de cause, peu important la question de l’insuffisance éventuelle des fonds nécessaires au paiement des loyers à échoir qui concerne les autres contrats en cours.

 

Enfin, rien n’oblige l’administrateur à restituer immédiatement les locaux, la date de restitution pouvant être fixée à une date ultérieure à celle de la réception de la notification.