Si la plupart des baux actuellement en cours comportent une clause d’indexation, il faut se souvenir que cela n’a pas toujours été le cas. La validité de ces clauses, désormais codifiées à l’article L.112-2 du Code Monétaire et Financier n’est consacrée que par l’ordonnance du 30 décembre 1958. Cela explique notamment la raison pour laquelle cohabitent souvent à l’intérieur des baux commerciaux une clause d’indexation annuelle et une clause de révision triennale dite légale, qui permet à l’une ou l’autre des parties d’indexer le loyer en cours sur l’évolution de l’indice de référence. Quand cet indice est identique, l’intérêt de la révision légale est bien entendu moindre puisque aboutissant en principe au même résultat, elle est non automatique et soumise à un formalisme particulier. Le dispositif n’est pourtant pas sans risque puisqu’il résulte des dispositions du troisième alinéa de l’article L.145-38 du Code de Commerce que : « Par dérogation aux dispositions de l’article L. 145-33, [qui prévoit que le loyer doit être fixé à la valeur locative] et à moins que ne soit rapportée la preuve d’une modification matérielle des facteurs locaux de commercialité ayant entraîné par elle-même une variation de plus de 10 % de la valeur locative, la majoration ou la diminution de loyer consécutive à une révision triennale ne peut excéder la variation de l’indice trimestriel des loyers commerciaux ou de l’indice trimestriel des loyers des activités tertiaires mentionnés aux premier et deuxième alinéas de l’article L. 112-2 du code monétaire et financier, intervenue depuis la dernière fixation amiable ou judiciaire du loyer. Dans le cas où cette preuve est rapportée, la variation de loyer qui en découle ne peut conduire à des augmentations supérieures, pour une année, à 10 % du loyer acquitté au cours de l’année précédente ». La tentation était forte de rechercher par le biais de ces dispositions un moyen de « déplafonner » le loyer en cours de bail…de plus ou moins bonne foi d’ailleurs. Dans un arrêt du 20 mai 2015, la Chambre Commerciale de la Cour de Cassation précise, aux termes d’une rédaction inédite mais parfaitement claire, qu’en l’absence matérielle de modification des facteurs locaux de commercialité ayant entraîné par elle-même une variation de plus de 10% de la valeur locative, il n’y a pas lieu à révision triennale du loyer régulièrement indexé. On ne saurait mieux dire qu’en présence d’une clause d’indexation, la révision triennale ne peut aboutir à une modification du loyer, sauf à ce que le demandeur fasse la démonstration d’une « modification matérielle des facteurs locaux de commercialité entraînant par elle-même une variation de plus de 10% de la valeur locative »…laquelle est particulièrement difficile à établir. Pour être tout à fait complet, il faut rappeler que la jurisprudence de la 3ème Chambre Civile de la Cour de Cassation avait déjà précisé que le loyer révisé dans le cadre des dispositions de l’article L.145-38 du Code de Commerce ne pouvait être fixé qu’à un montant compris dans la double limite du denier loyer fixé contractuellement ou judiciairement et d’un plafond résultant de la variation de l’indice de référence mettant ainsi un frein aux tentatives de fixation à la baisse des loyers en cours de bail. La formule retenue par la Chambre Commerciale de la Cour de Cassation ne résout bien évidemment pas de façon définitive toutes les difficultés d’application de l’article L.145-38. La Cour de Cassation relève que la clause d’échelle mobile fait référence en effet à un « indice légal », étant rappelé que la loi dite Pinel du l8 juin 2014 a supprimé l’indice INSEE du coût de la construction en tant qu’indice de référence pour le calcul du loyer plafond. La solution aurait-elle été différente si l’indice de référence était distinct de celui visé en vertu de l’article L.145-38 du Code de Commerce ? La question reste entière puisque cette affaire portait sur un bail où l’indice de référence de la clause de révision triennale et de la clause d’échelle mobile était identique. Il faut reconnaître que cela est bien souvent le cas et que cet arrêt, appelé à la plus large publication, devrait mettre un terme à de nombreuses demandes de tentative de « rééquilibrage » du loyer manifestement infondées.