La loi du 31 mai 2021[1] a instauré le passe sanitaire.
Initialement applicable jusqu’au 30 septembre 2021, ce dispositif concernait les voyageurs en provenance ou à destination de la France et l’accès aux lieux, établissements ou événements impliquant de grands rassemblements (de plus de 50 personnes depuis le 21 juillet) pour des activités de loisirs, foires ou salons professionnels.
La loi du 5 août 2021[2] ainsi que ses trois décrets d’application et l’arrêté du 7 août 2021 ont prolongé ce dispositif jusqu’au 15 novembre 2021 et étendu son champ d’application.
Désormais, salariés et employeurs sont encore davantage impliqués dans la lutte contre la pandémie liée à la propagation du virus de la Covid-19.
Pour faciliter sa mise en œuvre, le Ministère du travail, de l’emploi et de l’insertion a publié un protocole national[3] et un « questions-réponses »[4] mis à jour au 9 août 2021.
Nous vous proposons ci-après un état des lieux en 5 points sur ces nouvelles obligations.
- Certains salariés auront l’obligation de présenter un passe sanitaire.
Les salariés de certains établissements, services et évènements devront présenter un passe sanitaire valide lorsque la gravité des risques de contamination en lien avec l’exercice des activités qui y sont pratiquées le justifie, au regard notamment de la densité de population observée ou prévue.
Concrètement, les secteurs d’activité visés limitativement par la loi du 5 août 2021 sont les suivants[5] :
- Les activités de loisirs (salles de spectacles, musées, bibliothèques restaurants…),
- Les activités de restauration commerciale ou de débit de boissons (à l’exception de la restauration collective, de la vente à emporter de plats préparés et de la restauration professionnelle routière et ferroviaire),
- Les foires, séminaires et salons professionnels,
- Les activités de transport public de longue distance sur le territoire national (sauf urgence),
- Les services et établissements de santé, sociaux et médico-sociaux,
- Les transports publics de longue distance,
- Les grands magasins et centres commerciaux de plus de 20.000 m², sur décision motivée du représentant de l’Etat dans le département.
Le protocole national précise que sont exclus de cette liste les espaces non accessibles au public ou en dehors des horaires d’ouverture au public.
Toutes les personnes qui interviennent sur ces lieux sont concernées par cette obligation : salariés, intérimaires, stagiaires, bénévoles, prestataires, sous-traitants…
En revanche, les salariés des services de livraison se présentant sur l’un de ces lieux ou ceux intervenant dans le cadre de missions ou de travaux urgents ne sont pas tenus de présenter un passe sanitaire.
- Quand sont applicables ces nouvelles règles ? Quels justificatifs les salariés devront-ils présenter au titre du passe sanitaire ?
Cette règlementation est applicable à compter du 30 août 2021.
Pour les travailleurs de moins de 18 ans (mais de plus de 12 ans), le passe sanitaire s’imposera à compter du 30 septembre 2021.
Les salariés concernés devront alors présenter à leur employeur l’un des quatre justificatifs suivants, sous format papier ou numérique :
- Le résultat d’un examen de dépistage virologique ne concluant pas à une contamination par la covid-19 (RT-PCR, test antigénique ou autotest réalisé par un professionnel de santé[6] de moins de 72 heures),
- Un justificatif de statut vaccinal concernant la covid-19 (schéma vaccinal complet),
- Un certificat de rétablissement à la suite d’une contamination par la covid-19 (datant d’au moins de 11 jours et de moins de 6 mois),
- Une attestation de contre-indication médicale faisant obstacle à la vaccination délivrée par un médecin.
Les personnes intervenant sur les établissements, services et évènements qui auront présenté l’un de ces justificatifs ne seront plus contraintes de porter le masque sur ces lieux, à l’exception de celles travaillant dans le secteur des transports publics.
Néanmoins, le préfet de département ainsi que l’exploitant du lieu ou de l’organisation de l’événement peuvent décider d’imposer le port du masque si les circonstances locales le justifient.
La loi prévoit également une obligation vaccinale pour les soignants appartenant au secteur privé et public. Les soignants devront, à compter du 15 septembre 2021, justifier de l’administration d’au moins une des doses requises de vaccin contre la Covid-19.
Au 15 octobre suivant, ils devront être en mesure de présenter soit un justificatif attestant d’un statut vaccinal complet, soit un certificat de rétablissement, soit une attestation de contre-indication médicale à la vaccination.
- Quels rôles pour l’employeur ?
Lorsqu’il est concerné par ces mesures, l’employeur est tenu de contrôler la validité du passe sanitaire ou de l’obligation vaccinale de ses salariés.
Si, en application des articles L. 2312-8 et L. 2312-14 du code du travail, la mise en place de ce contrôle a des conséquences sur l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise, il est nécessaire d’informer et de consulter immédiatement le comité social et économique (CSE) à ce sujet (s’il en existe un).
Compte-tenu de la nécessité de mettre en œuvre ces contrôles rapidement, la loi a aménagé cette procédure d’information-consultation du CSE : l’employeur doit informer le CSE sans délai et par tout moyen sur les mesures de contrôle mais il n’a pas à obtenir l’avis du CSE avant d’adapter l’organisation de l’entreprise à ces mesures.
Le CSE dispose d’un délai d’un mois au plus tard à compter de la communication par l’employeur des informations relatives à ces mesures pour rendre son avis.
C’est au responsable de l’entreprise ou de l’établissement d’assurer le contrôle des salariés et professionnels intervenant sur le site, quand bien même il ne serait pas leur employeur direct. Ainsi, il revient à l’entreprise utilisatrice de contrôler le passe sanitaire des intérimaires au même titre que les salariés permanents.
S’agissant des clients, l’employeur peut déléguer cette mission de contrôle à l’un de ses salariés. Dans ce cas, il doit désigner nommément chaque contrôleur et tenir un registre détaillant les personnes concernées et la date de leur habilitation, ainsi que les jours et horaires des contrôles effectués par ces personnes.
Nous vous conseillons de suivre le même procédé pour contrôler votre personnel sur le lieu de travail.
Si le responsable de l’entreprise ou de l’établissement confie la mission de contrôle à un ou plusieurs salariés, il lui appartient de fournir les équipements nécessaires à l’accomplissement de ce contrôle. L’usage du téléphone personnel des salariés est envisageable, mais uniquement avec leur accord et si cet usage n’entraine pas des frais supplémentaires pour les salariés.
Pour les salariés soumis à l’obligation vaccinale, la loi autorise l’employeur (ou l’Agence Régionale de Santé compétente) à conserver le résultat du contrôle du justificatif de statut vaccinal. Ces documents seront détruits à la fin de l’obligation vaccinale.
La loi prévoit aussi que ces personnes peuvent transmettre le certificat de rétablissement ou le certificat médical de contre-indication au médecin du travail compétent, qui informe l’employeur, sans délai, de la satisfaction à l’obligation vaccinale avec, le cas échéant, le terme de validité du certificat transmis.
Concernant les salariés soumis au passe sanitaire, l’employeur peut aussi conserver le résultat du contrôle opéré et délivrer, le cas échéant, un titre spécifique permettant ensuite une vérification simplifiée.
En tout état de cause, l’employeur ne peut pas conserver le justificatif. Par conséquent, il ne peut pas conserver le QR code mais uniquement le résultat de l’opération de vérification, c’est-à-dire l’information selon laquelle le passe est valide ou non.
Les informations ainsi collectées sont des données à caractère personnel soumises au Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD).
Au-delà de contrôler la validité du statut vaccinal de ses salariés, l’employeur doit inciter ceux présentant des symptômes du virus de la Covid-19 à quitter le lieu de travail, s’isoler à leur domicile et se faire tester rapidement.
Par ailleurs, l’employeur est tenu d’autoriser les salariés à s’absenter de leur poste de travail afin qu’ils puissent se faire vacciner ou accompagner une personne mineure ou majeure protégée dont il a la charge à cette fin. Ces heures d’absence seront payées et considérées comme du temps de travail effectif. Cependant, un justificatif de cette absence pourra être demandé a posteriori, comme la confirmation du rendez-vous de vaccination.
En revanche, le temps nécessaire pour les salariés pour se faire tester (RT-PCR, test antigénique ou autotest) n’est pas considéré comme du temps de travail effectif, les salariés n’ont donc pas à être rémunérés à ce titre.
Concernant le règlement intérieur, l’employeur n’est pas tenu d’y intégrer ces nouvelles obligations.
- Que se passe-t-il si le salarié ne présente pas de passe sanitaire valide à son employeur ou ne respecte pas l’obligation vaccinale ?
Chaque salarié doit être en mesure de présenter à son employeur un passe sanitaire valide.
A défaut :
- En accord avec son employeur, le salarié pourra poser des jours de congés payés acquis (légaux ou conventionnels) ou bien des jours RTT jusqu’au jour où il sera en capacité de présenter l’un des justificatifs requis.
- S’il refuse de poser des jours de congés payés ou de RTT, son contrat de travail sera suspendu (ainsi que sa rémunération).
Au-delà d’une durée de suspension équivalente à trois jours de travail, l’employeur convoquera le salarié par tout moyen (nous recommandons l’envoi d’un courrier recommandé AR ou remis en mains propres contre décharge) à un entretien afin d‘examiner les possibilités pour régulariser sa situation.
Par exemple, le salarié pourra exécuter ses missions en télétravail si son poste est éligible à ce dispositif, ou bien être affecté temporairement sur un autre poste n’imposant pas la présentation d’un passe sanitaire. Dans cette dernière hypothèse, le droit commun du droit de la modification du contrat de travail s’appliquera.
Cette durée de suspension est sans incidence sur la durée des contrats de travail à durée déterminée (CDD).
Également, elle est sans effet sur les mandats des représentants du personnel et/ou syndicaux. Néanmoins, l’employeur pourra prendre des mesures pour en faciliter l’exercice (par exemple : faciliter les échanges à distance).
La prolongation de cette situation ne pourra pas constituer un motif de licenciement ni justifier la rupture anticipée des CDD ou des contrats d’intérim.
En revanche, la loi ne précise pas si un tel comportement pourrait être sanctionné par une autre mesure moins sévère.
Enfin, nous rappelons qu’en cas de contrôle, la non-présentation du passe sanitaire dans les lieux où il est rendu obligatoire est puni d’une amende de 135 €.
- Quelles sanctions en cas d’absence de contrôle par l’employeur de la présentation par ses salariés de leur passe sanitaire ?
A défaut de contrôle par l’employeur de la présentation par ses salariés de leur passe sanitaire, il risque d’être pénalement sanctionné d’une amende de 1 500 € pour une personne physique et 7 500 € pour une personne morale (par infraction).
Si l’employeur récidive à plus de trois reprises sur une période de 30 jours, il est susceptible d’être puni d’un an d’emprisonnement et de 9.000 € d’amende (45.000 € pour une personne morale).
Concernant l’absence de contrôle par l’employeur du respect de l’obligation vaccinale par ses soignants, le montant de l’amende forfaitaire est fixé à 1.000 € et celui de l’amende forfaitaire majorée à 1.300 €[7] (par infraction).
Le Département Social du cabinet Péchenard & Associés vous accompagne dans la mise en œuvre de ces démarches et répond à l’ensemble de vos questions sur le passe sanitaire en entreprise et l’obligation vaccinale des salariés.